Pourquoi nous combattons en Afghanistan

Publié le par Patrick Beaudouin

La mort de dix de nos soldats en Afghanistan n'a pas manqué de relancer le débat sur la participation de la France à la force internationale d'assistance à la sécurité. Elle a révélé que les raisons de notre présence était parfois mal comprises, quand elles ne donnaient pas lieu à des polémiques indécentes. C'est pourtant dans cette région que se joue une part de la liberté du monde, et que se mène le combat contre le terrorisme.


La présence française date du lendemain des attentats du 11 septembre. « Si l’on veut frapper le terrorisme, il est logique de le faire là où est son premier sanctuaire, en Afghanistan », déclarait le Premier ministre de l'époque, Lionel Jospin. Cette action a été engagée dans le cadre d’un mandat de l’ONU, délégué à l’OTAN pour sa mise en oeuvre.


Base arrière du terrorisme mondial, où il trouvait refuge, assistance et financement, l'Afghanistan était aussi sous le joug de la dictature talibane, synonyme d'asservissement des femmes, de châtiments corporels d’un autre temps, d’exécutions barbares, d’obscurantisme culturel et de prohibition des libertés.


Depuis 2001, les progrès ont été sensibles : la dictature talibane a été renversée, une constitution a été promulguée, des élections libres se sont tenues ; l'armée afghane, à la formation de laquelle la France prend une part active, atteint désormais 50 000 hommes ; les pays de l’OTAN ont conduit plus de 1000 projets de développement.


Toutefois, ces succès sont encore insuffisants et fragiles, et la situation reste loin d'être stabilisée. L’Afghanistan est en effet devenu un enjeu pour le terrorisme international. En témoigne le fait que, parmi les ennemis tués lors de l'embuscade du 19 août lors de la riposte de nos forces armées, seule une minorité était afghane.


De surcroît, la zone est d’une très grande instabilité. L’Afghanistan est en effet enchâssé entre l’Iran à l’ouest et le Pakistan au sud et à l’est


Parce que les valeurs de la France sont universelles, qu’elle promeut la liberté, l’égalité, la démocratie, les valeurs de dignité humaine, parce qu'elle doit assumer les responsabilités que lui impose son statut de grande puissance mondiale, il était essentiel que nous nous engagions aux côtés des 37 pays, dont 25 des 27 États de l’Union européenne, membres de la coalition, afin d'amplifier la sécurisation du pays, approfondir son développement économique et social, accélérer le plein exercice de la souveraineté nationale par les autorités afghanes.


En tant que citoyen et rapporteur du budget « Lien Armées-Nation » à l'Assemblée nationale, j'ai naturellement tenu à assister, aux Invalides, à l'hommage national rendu aux soldats tombés pour la défense de nos valeurs.


Invitée, la semaine dernière, à auditionner le Ministre des Affaires étrangères, Bernard Kouchner, et le Ministre de la Défense, Hervé Morin, la représentation nationale débattra bientôt de la présence française en Afghanistan, et, grâce à la révision constitutionnelle adoptée en juillet, s'exprimera par un vote.


L'alternative est la suivante : soit nous décidons d’abdiquer, et de laisser les Afghans lutter seuls. À ce moment-là, les terroristes auront gagné leur combat, et il serait bien illusoire de croire que cette seule victoire leur suffirait : notre sécurité nationale serait directement menacée par un effondrement de l’Afghanistan, qui redeviendrait un sanctuaire pour un terrorisme international qui cible directement notre pays, ses valeurs, ses principes, ses intérêts et ses ressortissants ; soit nous nous montrons à la hauteur du sacrifice de ces dix soldats français et de l’engagement de leurs camarades présents en Afghanistan, parce qu’ils défendent des valeurs justes et essentielles en même temps que la sécurité de nos compatriotes.


C'est cette dernière voie que m'ont engagé à suivre les soldats blessés en Afghanistan à qui je viens de rendre visite à l'hôpital Bégin, et dont le sang-froid et la détermination forcent l'admiration.


Mais il nous faudra évidemment nous interroger, en lien avec nos alliés, sur les modalités de notre intervention sur le terrain, notamment afin de protéger au maximum nos soldats.

Publié dans Actualité

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article